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Autographe2.0. merci Luis Litt

On a tous dans notre série préférée un personnage qu'on adore, dont le jeu d'acteur nous plait plus que les autres et dont le rôle souvent second accroche la lumière et la curiosité par son caractère complexe. Et donc, on est un peu fan. Hier après-midi, j'ai eu un autographe2.0 de Rick Hoffman qui joue l'incroyable avocat juif, névrosé, ambitieux sadique, ultra sensible de la série Suits avocats sur mesure. J'ai nommé Luis Litt. Cet autographe2.0 a consisté en un "Thank you David envoyé sur Twitter par l'intéressé. Le fan prend ce qu'on lui donne...

Cet épisode fétichiste m'a rappelé un papier signé dans l'Express il y a deux ans sur la notion d'autographe2.0. Aujourd'hui l'autographe s'est dématérialisé, il est devenu une mention sur Twitter ou un petit message de la star à son fan.

Here we are.

Autographe2.0. merci Luis Litt

A l'ère de l'autographe2.0

Samedi dernier, nous regardions The Voice en famille, sur TF 1, quand mon aînée, âgée de 12 ans, s'est mise à hurler. "Papa, papa! Y'a Nikos qui m'a fait un RT!

- Un quoi?

- Un "retweet"! Il a renvoyé mon message à tous ses abonnés de Twitter! Tu te rends compte? Un RT de Nikos!!

- Ah oui? Et tu lui avais envoyé quoi, à Nikos

- Ben, une photo de la télé!"

Sur l'instant, je n'ai pas saisi l'état de surexcitation de ma fille; et puis je me suis rappelé qu'après un quart de finale de l'Euro de football, en 2000, j'avais fait signer à Zidane un maillot bleu étoilé; c'était juste après un match, lors d'une opération sponsorisée par un opérateur téléphonique. J'avais fait ensuite encadrer le maillot, je l'ai, depuis, conservé comme une relique.

Quel rapport entre un maillot signé par Zidane et un RT de Nikos Alliagas, animateur de l'émission star de TF1 ? Pour le comprendre, il faut interroger la notion d'autographe à l'heure des nouvelles technologies. Petit détour préalable par le VIe arrondissement de Paris. Il y a, dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, plusieurs boutiques spécialisées dans les manuscrits de personnalités. On y trouve, en cherchant bien, des billets signés de Baudelaire des lettres de Léon Blum ou des partitions annotées par Berlioz.

Je n'ai rien contre les collectionneurs d'autographes, mais Internet a considérablement renouvelé ce genre de fétichisme. En inventant les fans numériques, Facebook a d'abord rapproché les stars de leurs groupies, en réduisant la barrière symbolique entre la célébrité et l'anonymat, au point qu'aujourd'hui, sur Internet, la star fait mine d'être comme tout le monde, tandis que tout le monde se prend pour une star.

Le Web en général, et Twitter en particulier, a inventé ce que j'appellerais le "piédestal de proximité". Il suffit qu'un Snoop Dogg vous réponde d'un LOL spécialement rédigé pour vous ou qu'une Lady Gaga confie la primeur de ses états d'âme à ses abonnés et c'est le délire, ce sentiment unique que tout cela n'existe que pour vous. Le tweet de la star, c'est un peu la chemise lancée dans le public à la fin du concert, c'est la baguette que Charlie Watts, le batteur des Stones, projetait dans la foule avant de quitter la scène. Sauf que, sur Twitter, chacun attrape la baguette.

L'hiver dernier, un développeur toulousain a parfaitement compris cette évolution de l'autographe, à l'heure des réseaux et du smartphone. Il a créé une application (1) très simple, qui permet:

1) de se prendre en photo avec la star si on a la chance de la croiser;

2) à la star photographiée de signer sa photo avec le doigt sur l'écran tactile de votre téléphone (ce qui évite de chercher le papier et le crayon);

3) de partager ladite photo signée avec toute sa tribu!

Le fan a ses raisons que la raison ignore, à l'heure du papier paraphé d'autrefois comme à l'heure du numérique d'aujourd'hui. Je n'échangerais mon maillot dédicacé de l'équipe de France 2000 pour rien au monde, et ma fille n'oubliera jamais le RT de Nikos Aliagas. La différence entre nos deux générations est infime, mais elle existe.

Nous sommes deux admirateurs, mais notre rapport au réel et à la notoriété est différent. Je tiens à la preuve matérielle de ma rencontre avec Zidane comme à la prunelle de mes yeux. Ma fille, elle, n'oubliera jamais ce contact virtuel avec Nikos un samedi soir. Mais là où je sais parfaitement qui, de Zidane ou de moi, est la vedette, ma fille, elle, n'a aucun scrupule à se servir du message de Nikos pour faire valoir sa popularité auprès des copines qui la suivent sur Twitter. Sur Internet, Nikos devient le faire-valoir de ma fille...

(1) SignTouch, sur l'Apple Store.

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